Tourner ses paumes vers la terre

Photographie d'une main d'enfant tendue vers l'avant.

Dans le métro…

 

Des éclats de rire me tirent d’une vague rêverie.
Entendre un rire franc dans le métro parisien est plutôt rare.
Des femmes à l’allure gitane en compagnie de leurs enfants sont installées à ma droite. Ils forment un groupe d’où se dégage une ambiance de joyeuse affection.
Une des petites filles apprend à mendier.
Elle commence par s’avancer parmi les passagers en tendant sa main dans un geste précis de cueillir.  Fait assez rare, les pièces ne manquent pas de tomber dans sa petite main et, avec chacune d’elles, elle court vers sa mère.

 

Je suis toute absorbée par la scène, touchée par la grâce de la petite fille. Elle me fait penser aux modèles des tableaux du Caravage.  Du coup ma rêverie s’oriente. De quoi sera faite sa vie ? Quel sera son chemin ?
Apprendra-t-elle un jour à retourner délibérément ses paumes vers la terre ?

 

Les mains sur les cuisses

 

Quand nous nous asseyons sur un coussin de méditation nous laissons reposer les mains sur les cuisses. Même si ce n’est pas l’essentiel de la posture, j’aime porter une attention sur les mains. Comment sont-elles posées? S’agrippent-t-elles? Ou s’abandonnent-elles? Sont-elles abandonnées? Ou sont-elles un appui de plus ?
Faisant le lien entre le haut et le bas elles unifient la posture.
Porter l’attention sur elles me met directement en lien avec les coudes, les épaules, le dos, la position de la tête.  Cela me permet de peaufiner la posture, de sentir qu’il faut parfois redresser subtilement le dos à partir de l’intérieur.
Sur les 206 os dont nous sommes constitués, 54 sont dans nos deux mains. Plus d’un quart donc. Et le miracle morphologique des mains, c’est qu’elles s’adaptent au point de prendre la forme de l’objet qu’elles touchent.
Dans notre cas, elles s’adaptent à la forme des cuisses, on dit qu’elles épousent les cuisses.

 

En mai 1926, quelques mois avant de mourir,  Rainer Maria Rilke écrit à Marina Tsvétaïeva « Tu as plongé tes mains, Marina, tour à tour offrantes et jointes, tu as plongé tes mains dans mon cœur comme dans le bassin d’une fontaine ruisselante : et maintenant, aussi longtemps que tu les y garderas, le courant contenu coulera vers toi »

 

Elisabeth Larivière
Paris
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