Responsabilité et créativité

Citation d'antoine de Saint-Exupéry : "On ne peut pas être en même temps responsable et désespéré."

En pratiquant la méditation, nous nous rendons compte peu à peu qu’elle nous demande une chose quelque peu inattendue : prendre nos responsabilités.

Cela peut paraître étonnant, car il arrive bien plus souvent que ce soit nous qui attendions monts et merveilles de la pratique. Or ce que nous découvrons avec la pratique, c’est sa demande à elle ! Comment cela est-il possible ?

S’engager sur le chemin de la méditation débute par un long travail sur nos habitudes et notre manière conventionnelle d’entrer en rapport au monde. Nous découvrons tout à coup que nous avons des pensées obsédantes, que notre esprit nous donne souvent l’impression d’être indomptable, que nous avons une tendance à être paranoïaques dans certaines circonstances, ou que le bavardage et le commérage prennent beaucoup de place dans notre vie, ou encore que notre premier réflexe par rapport aux situations c’est d’être inquiets.

Quelles responsabilités ?

La responsabilité ici est double.

D’une part, il y a celle de continuer à s’asseoir ! Sentant qu’il y a quelque chose de bon dans le fait de s’asseoir, on continue à pratiquer. Intégrer la méditation dans son quotidien est un acte héroïque aujourd’hui car, assez paradoxalement, s’accorder le temps de ne rien faire est très difficile dans ce monde d’hyper vitesse.

D’autre part, il y a la responsabilité d’aller regarder de plus près toutes nos habitudes. Une transformation de l’existence ne peut en effet advenir que si un diagnostic honnête de notre situation est établi.

Ce sont deux moments de responsabilité importants, car ils ne sont pas toujours spontanés, ils demandent de nous un sursaut, une décision.

Ainsi, de manière plus large, la méditation nous demande de prendre la responsabilité de notre propre existence. Elle nous invite à nous y établir, à nous asseoir en son cœur.

Une libération

Dit ainsi, nous ne pouvons qu’acquiescer, mais ce n’est pourtant pas chose facile car cela implique de tenir droit, seul.

C’est un point de bascule à partir duquel nous ne considérons plus quoi que ce soit comme un doudou pour nous rassurer, nous n’attendons plus que quelque chose d’extérieur nous dise comment mener notre existence, que ce soit les autres, les circonstances, un enseignant, une tradition… Bref nous ne faisons plus porter le poids de notre existence sur autrui.

Peut-être cela peut-il sembler lourd à porter tout seul mais, si la responsabilité est un poids, elle va aussi surtout de pair avec une grande liberté, l’un ne va pas sans l’autre. Si nous n’attendons plus d’autrui qu’il guide notre conduite, nous pouvons alors à tous moments la réinventer et l’ajuster. De là découle directement la créativité.

Voir les possibles

Avoir un rapport créatif au monde naît d’un rapport libre à l’existence qui permet de voir des possibles là où ils restaient jusqu’alors comme des points aveugles. En méditant, nous nous rendons compte que ces habitudes que nous avons mises au jour ne sont pas aussi solides que nous le croyions. Il y a des brèches. Il y a du jeu, de l’espace pour agir autrement.

Il n’y a rien de grandiose ou d’inatteignable là-dedans. Par exemple, si je suis appelée chez le Directeur de mon lycée, je vois que la première chose qui me passe par l’esprit c’est « ouille, qu’est-ce que j’ai fait, ai-je oublié de rendre un papier ? … » Je peux alors juste me rappeler sans en faire toute une histoire qu’il y a cette petite tendance à la culpabilité, qu’elle est une pensée comme tant d’autres et que je peux me foutre la paix avec ça et en profiter pour demander quelque chose pour laquelle l’occasion ne s’était pas encore prêtée. Ou, au lieu de faire tout le scénario d’une conversation téléphonique à l’avance avec mon éditeur, juste me rappeler que, quand l’inquiétude vient me dire bonjour, je peux faire confiance en la conversation qui me donnera elle-même les clés nécessaires pour dire ce qu’il y a à dire.

La créativité, c’est cet espace laissé libre pour autre chose que ce qui est déjà bien connu et bien rôdé. La créativité, c’est la confiance que la situation recèle en elle toutes les réponses et que, si on apprend à écouter l’action qu’elle requiert, elle sera bien ajustée.


Marine Manouvrier

Bruxelles

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