Sur le fil

Image d'un équilibriste marchant sur un fil, dans un paysage bleu de ciel et de mer

Pourquoi pratique-t-on ?

Pourquoi marche-t-on depuis le sommet d’un immeuble à un autre ?

Peut-être par goût de l’aventure, ou bien par habitude.

Le premier pas n’est pas le plus difficile. C’est au milieu, que tout bouge. Mon esprit revient à lui, et que voit-il ? Lui-même. Un miroir se dresse face à nous. Comment avancer ?

Rouge

C’est bien ce qu’il se passe, sur le coussin de méditation. Je m’absente, pars dans mes pensées, puis suis rappelé. Je puis faire du mauvais esprit, faire semblant de n’avoir rien vu, ou bien juste ne pas me donner la possibilité d’être intéressé par ce retour, et repartir aussitôt.

Ou bien je peux, d’un léger coup de rein spirituel, m’incliner vers ce qui est, entrer dans la danse de la pratique. Regarder. L’esprit se voit, se voit se démener avec ses pensées, tenter de les trier, abandonner, recommencer, balbutier, tel un contrôleur novice abandonné au milieu d’une foule de travailleurs pressés.

Mais soudain, l’esprit-contrôleur s’arrête. Une pensée, vêtue d’une belle robe rouge, a fendu la foule jusqu’à lui. Elle n’est comme aucune autre, si grises et grasses. Elle, elle sait ce qu’elle veut. Moi. Mon attention, qu’elle drague à mesure qu’elle s’avance. Je palpite.

Elle repart, me laissant avec sa robe sur les bras. Je reprends le contrôle des titres de transport mentaux.

Réunion

Puis je change de casquette, et me retrouve de nouveau sur le fil. Qu’est-ce qui fait que soudain, je vois ? Quelle est cette inclination, ce choix qui n’est pas que volontaire ?

Pourquoi le fil ? De quoi est-il fait ? De la soie de l’attention. Aussi robuste que délicate. J’avance, succession de pas arrêtés. L’image m’échappe. Je m’échappe aussi, saute sans chuter.

C’est ça. Je m’arrête, sur le fil. Instant fragile, mais sans risque. Sans séparation entre le fil, le marcheur, et l’espace qui tressaille.

Mon esprit se voit et par là se réunit, quand bien même il pourrait se réfléchir. Plus besoin d’avancer.

Mon esprit c’est le marcheur, mais aussi le fil, et il danse avec lui-même. Mais mon esprit, c’est aussi le vent témoin de cette rencontre si humaine. Vent qui peut s’embraser, tout oublier, et plonger fil et marcheur dans l’abîme. Mais vent qui peut aussi les entourer et s’insuffler dans chaque ligne du corps, dans chaque pli du temps, et tout réveiller.

Force qui n’a pas d’origine, et pourtant nous anime. Ni nous, ni non-nous.

Martin Monin

Kuala Lumpur

0 commentaires

Laisser un commentaire

Rejoindre la discussion?
N’hésitez pas à contribuer !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.