Journal intime et pratique de la méditation

Image du tableau "L'Annonciation" de Botticelli

Dans  l’introduction à son Journal 1973-1982, l’écrivaine Joyce Carol Oates écrit ceci : « Tenir un journal est-il essentiellement un moyen de se consoler, grâce à une « voix » qui est la nôtre, subtilement transformée ? Un moyen de dissiper la solitude, un réconfort ? »

À la lecture de ces lignes, j’ai senti confusément qu’il y avait un point commun entre la tenue d’un journal intime et la pratique de la méditation.

Un rendez-vous avec soi

J’ai tenu un journal de façon épisodique, pendant plus de dix ans, lorsque j’étais jeune adulte. Je me tournais vers mon journal pour lui confier mon mal-être, mes déconvenues sentimentales et ma solitude.  De même, on peut venir à la pratique parce qu’on sent que cela ne va pas, pour être consolé. Mais là n’est pas l’essentiel.

Alors, est-ce le fait que l’écriture d’un journal intime se fait entre soi et soi, « grâce à une « voix » qui est la nôtre » comme l’écrit Joyce Carol Oates ?  Car on peut dire que la pratique de la méditation est un rendez-vous avec soi-même. Et tout comme l’écriture qui, par l’entremise du langage, crée un certain espace de jeu entre notre expérience et nous, on peut aussi sentir un espace, une mise en retrait lorsqu’on médite.  Mais là encore ce n’est pas l’essentiel. 

L’écriture d’un journal relève pour moi du simple exutoire, apportant certes parfois un certain soulagement, mais celui-ci est toujours temporaire, alors que la pratique de la méditation nous transforme, nous remue et nous reconfigure en profondeur.

La forme de la pratique

Ce qui relie la tenue d’un journal et la pratique de la méditation, c’est une courbe.

La courbe que forment le dos et la tête de l’écrivain qui se penche sur sa table d’écriture, le stylo à la main, en train d’essayer de faire face à sa vie, d’être au plus près de soi.

Détail de l’Annonciation de Botticelli

On retrouve cette même courbe si on est avec un ami qui souffre.  On ne se tient pas droit comme un bâton, on se penche vers lui, attentif de tout notre cœur à sa souffrance. On est auprès de lui.

Un parent qui tient un tout petit enfant dans ses bras, se penche pour être pleinement avec son petit.

C’est la courbe de Marie dans l’Annonciation de Botticelli.  Elle se penche vers l’Archange Gabriel. Celui-ci vient lui apprendre qu’elle sera la mère du fils de Dieu. Elle est entièrement écoute, recueillement, pleine de grâce, pour être au plus près de cette parole.

Nous sommes dans cette même disposition intérieure lorsque nous pratiquons. Être avec, être auprès de.  Une attention bienveillante, une présence profondément intime, se penche vers nous avec une infinie tendresse. C’est tellement délicat et fragile que souvent on ne le voit pas.

Anne Vignau

Saint-Gratien

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