Les Quatre forces guident ma pratique

Photo du tableau "L'or de l'azur" (1967) de Miró

Ce matin, la pratique s’est révélée sous un jour nouveau. Fabrice Midal nous invite à pratiquer la méditation en nous laissant guider par « quatre forces » et celles-ci m’accompagnent. La première force, l’écoute, me parle assez spontanément et pourtant de jour en jour, je remarque que souvent, j’ai tendance à m’échapper. Ce n’est pas si facile d’entrer réellement dans une écoute nuancée et vraiment en lien avec les sons qui me parviennent. Je remarque souvent que mon écoute est un peu automatique, un peu désintéressée, un peu mécanique. Je reviens, je m’invite à plus de finesse, d’attention différenciée, proche de ce qui est particulier à ce moment-là. J’écoute plus loin, plus proche mais aussi j’écoute ce qui parle, ce qui me surprend, me déplace.

Aujourd’hui, ma pratique fut très différente, j’aurais envie de dire « matiérée ». En m’asseyant, j’ai tout de suite été prise par une force qui m’attirait vers le coussin, mon corps me semblait très large et même peut-être entouré d’une sorte de scaphandre. Mon écoute semblait se prolonger dans l’espace et je plongeais toute entière avec elle. Un gros oiseau ressemblait par son cri à une machine mécanique répétitive, comme une roue qui tournerait avec de gros rouages. Mon esprit semblait moins accroché à analyser ou comprendre de quoi il s’agissait. Je plongeais aussi dans le son du vent. Puis j’ai remarqué que seul mon côté gauche se prolongeait vers la fenêtre et que le droit était plus inerte.

Le corps en tant que prolongement de la terre

La seconde force, mon corps qui se pose était littéralement emporté aujourd’hui par sa masse attirée par la terre. Mes mains surtout me semblaient très volumineuses et comme entourées d’une chape un peu électrique. Tout mon corps me semblait dans un état que je ne connaissais pas tout à fait. À la fois très présent et en même temps sous la nécessité de se poser et d’abandonner quelque chose : une sorte d’enveloppe chargée de je ne sais quoi. C’est là que je me suis souvenue que la veille, nous avions ressenti une secousse qui avait fait tremblé la maison. Nous ne comprenions pas très bien ce qui se passait.

J’ai remarqué qu’un grand silence très poignant avait succédé à cette sorte de détonation. Ma tête tournait un peu mais sans trop savoir d’où venait cette sensation. Nous avons appris le soir qu’un tremblement de terre peu intense, d’une force de 2,8 mlv, avait eu lieu et dont l’épicentre était à 8 km de chez nous. Peut-être mon corps avait gardé une trace de ce tremblement ?

Il nous arrive souvent de percevoir des signes que notre corps nous envoie et nous ne les comprenons pas. Cette expérience m’a rappelé qu’il est possible de se relier à ces sensations inédites et inconnues, et de les reconnaitre comme elles se présentent. J’ai pu voir que cette façon de simplement les regarder leurs permettent de se transformer d’elles-mêmes. Grâce à ce moment de pause soutenu par les Quatre forces, petit à petit j’ai vu l’ensemble du corps s’ajuster, la sensation de masse s’est aérée.

Une expérience toujours neuve

La troisième force, le mouvement du souffle me semblait très épais et un peu lourd. J’avais l’impression qu’il faisait une chaleur lourde et humide. Je savais pourtant que cela n’était pas totalement réel à 8h du matin dans la montagne où je me trouvais. Je restais là, à accueillir cette perception étonnante, un peu étouffante et, soudain, une légère brise fraiche est arrivée de la fenêtre. Mon souffle s’est allégé et mon corps aussi. Tout ceci avait-il un rapport avec les tremblements de la terre ?

Peu importe. L’important est d’entendre et de sentir les contrastes de mon expérience, qui m’aident à m’y relier. Certains jours nous le rappellent. Il n’est pas nécessaire de rencontrer des événements extraordinaires pour écouter et vivre son corps et son souffle. J’avais pris le temps de me poser et de faire une pause : mon corps retrouvé pouvait se relier à la quatrième force, l’espace, de façon plus concrète : mon dos proche du mur s’y appuyait, sans le toucher pourtant, et ma poitrine s’ouvrait vers la fenêtre devant.

Puisse cette pratique m’inviter à une écoute toujours plus fine et ordinaire.

Sylvie Storme

Bruxelles

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